The Matching Cubes
Rompre la glace, c’est entrer en sympathie avec autrui et par extension faire les premiers pas dans une relation.
Nul besoin de cela avec les « Local Native » Matching Cubes, soit un tiers des Coming Soon, « les plus jeunes mais non les moins talentueux » comme l’affirme le flyer. Bien sûr les deux compères ne sont plus des perdreaux de l’année côté concert, mais le stress est bien présent quand il s’agit de jouer des morceaux antédiluviens remontant à 4 ou 5 ans qui servaient d’ouverture aux prestations des Coming Soon à leurs débuts. Mais Alex Banjo et Leo Bear Creek ont voulu vigoureusement réactiver ce side project en hibernation en proposant des versions hip hop trash folk de titres comme Love is not true ou Walk on the border line. Le set durera une grosse demi heure et nous aurons en prime l’aide confraternelle des quatre autres acolytes choristes d’un soir sur un titre plus WU en rappel, titre qui figurera ainsi que Sweetheart sur un 45 tours collector à paraitre très prochainement chantés sur une face par Coming Soon et sur l’autre par les Wave Pictures.
Au final, une mise en bouche très appréciable qui donnait le ton à une soirée qui allait être irrésistiblement envoutante avec Clues, groupe de Montréal totalement barré formé d’un ex Arcade Fire à la batterie, Brendan Reed et du leader des géniaux et défunts Unicorns, Alden Penner.
Clues
Ils sont rares les groupes où l’on sort du concert en se disant que l’on a assisté à quelque chose d’unique, avec un potentiel énorme et un avenir radieux. C’est définitivement le cas pour Clues qui surpend d’emblée par un gros son (deux batteries sur scène qui ne font pas dans la figuration) avec un chanteur guitariste, Alden Penner, tête de premier de la classe ou de représentant en aspirateur qui vous souffle par son incroyable énergie mêlée à une fragilité poignante.
Leur album qui est sorti en mai dernier sur le label exigent Constellation Records (Godspeed you! black emperor, Tindersticks, Vic Chesnutt, Silver Mt Zion pour ne citer que les plus connus), accompagné d’excellentes critiques laissait présager d’une prestation haute en couleurs sonores comme leur pochette et leurs t-shirts au merch’. Le résultat sur scène est impressionnant de maturité et d’émotion. Clues déploie une vitalité incroyable doublée d’une voix stratosphérique dans un genre inclassable avec deux batteurs bucherons, une basse où il manque une corde, des machines électronique, de micros hullulesques : au total 6 hurluberlus canadiens, le pays où le froid congèle les bons groupes pour mieux les exporter.
Leur musique est magistralement épique, elle offre un voyage au delà du dépaysement, A great escape pour paraphraser un autre cousin transatlantique, Patrick Watson. Les tempi changent tout le temps ce qui démultiplie les ambiances qui in fine s’avèrent être très proches d’une symphonie classique, Alden m’a soufflé rêver d’études en musicologie. Les compositions de Clues sont polymorphes, mélange de rock psychédélique, de post rock, punk, de ballades comptines et d’hymnes aux grands espaces, elles font naitre de fulgurantes images, entre violence et douceur, eau et feu, une symphonie tellurique où se succèdent cris explosifs, voix angélique apaisée, murmures élégiaques ou mélancoliques. Ce maelstrom sonore doit beaucoup à la structure peu commune des chansons qui jaillissent comme les coups de pinceaux d’un Van Gogh échappé de l’asile, âpres et lumineuses à la fois. Que cela soit Haarp, Perfect fit, Crows, Ledmonton ou In the dreams, chaque titre vous emporte, vous submerge, les pieds tapent le sol, la tête bat la mesure : Clues devrait faire attendre les impatients du forcément décevant prochain Arcade Fire.
Clues étaient en concert à la Maroquinerie le 27 février 2010