Comment est née l’envie de faire ce groupe ? Vous avez tous des emplois du temps tous très chargés…
Alexandre RAUX : Tout est parti d’Etienne, qui avait composé quelques instrus dont la particularité était qu’il avait accordé sa guitare en Si, ce qui donne un son très large et bas en tonalité. Avec Cam, qui commençait à se mettre sérieusement à la batterie, ils ont enregistrés la première mouture de Curious box qui sonnait « gros » et m’ont branché pour jouer avec eux à la basse. On a fait une première répétition ensemble, puis je fus pas mal pris avec Zenzile et Glass. Les gars m’ont relancé un plus tard, avec du coup Ben qui était des nôtres, et là nous avons commencé à répéter régulièrement et construit un set qui a conduit à ce premier album.
Etienne BELIN : effectivement. J’ai toujours été fasciné par l’atmosphère des groupes où les guitares sont accordées bas voire très bas… J’ai en tête notamment Torche et Deftones qui mêlent habilement cette lourdeur avec des mélodies. Du coup, j’ai voulu voir comment ça pouvait marcher. Et le reste s’est fait comme le dit Alex, en jonglant avec nos emplois du temps qui sont c’est vrai pas mal chargés. En effet, on bosse, on a des vies de famille, on joue dans d’autres groupes qui prennent du temps (moins depuis la crise sanitaire hélas…) mais on tous voulu enfoncer le clou à partir du moment où on avait un set et donc ce premier album !
Benoit CHEVALIER : Comme le dis Alex, tout est parti d’Etienne, il m’avait parlé de ce projet dont le truc serait de jouer avec des guitares accordées bas. Ça me paraissait intéressant d’autant plus que les morceaux étaient vraiment bien sur les démos qu’il avait réalisées sur MAO. On a fait nos premières répètes sur ces morceaux, dont le premier qui est devenue Curious Box, le morceau qui ouvre l’album.
Pourquoi avoir choisi J. Robbins pour le mix ?
Alexandre RAUX : On était en train d’enregistrer les voix de Ben quand le premier confinement est arrivé, ce qui a tout stoppé puisqu’on ne pouvait plus aller à notre local (où l’on a fait toutes les prises instrumentales de l’album), ça devenait compliqué pour finir les voix. On a donc commencé à échanger sur les mix, de qui pourrait le faire, on avait soit Cam, qui avait fait les prises et mixé le premier album de Lane, ou bien une personne annexe. Le nom de Jay est arrivé dans les discussions assez rapidement comme un vœu un peu pieu, on aime beaucoup les groupes dans lesquels il a joué, ainsi que les productions pour les nombreux groupes qu’il a fait, dont le dernier album en date de Daria. Cam étant en contact avec lui, il lui a envoyé un mail pour savoir si ça le brancherait. Il s’est trouvé qu’il avait eu beaucoup d’annulation (cause crise) et que du coup il avait du temps pour pouvoir mixer le disque.
Etienne BELIN : c’est vrai qu’on considère Jay comme une référence pour beaucoup des disques qu’on écoute et qu’on aime. Cam a parlera mieux que moi, mais aussi imaginer que des prises faites dans notre local de répét puissent traverser l’Atlantique, pour être mixées dans un vrai studio d’enregistrement (le Magpie Cage à Baltimore de Jay) ça relevait presque du fantasme… Mais finalement on a réalisé que ça pouvait se faire, que nos prises du local pouvaient être prises en main par quelqu’un d’autres… Ça ouvre le champ des possibles en fait :)
Camille BELIN : On a une admiration vraiment immense pour J. en tant que musicien mais aussi en tant que producteur et ingénieur du son et depuis quelques années désormais, et aussi suite aux projets communs entre Daria, Office of Future Plans et les tournées communes avec J., on est devenu proches avec la famille Robbins. Comme Alex le dit, lorsque l’on a été stoppé dans l’élan suite au premier confinement de Mars, on avait la tête dans cet enregistrement depuis quelques mois déjà et la pause nous a permis -et à titre perso également, ayant assuré les prises et l’enregistrement du disque à la maison- de prendre un peu de recul et de confirmer qu’une paire d’oreilles fraîches pour mixer tout cela serait super. J. avait des dispos, la crise aux USA tape bien dur, donc on trouvait que c’était le bon moment de faire appel à lui, et ce, en pleine confiance tant son talent et ses oreilles sont immenses !
Do Not Machine – The Host Inside
Ce fut un enregistrement…singulier avec le covid et le confinement. Comment se sont passées les sessions ?
Alexandre RAUX : On a commencé à enregistrer en formule basse/batterie au local, ça c’était courant oct-nov 19 il me semble, on a bien avancé, on a pu faire les guitares des gars à suivre, puis les percussions et enfin les voix de Ben. Tout roulait assez bien puis le confinement nous a obligé à tout arrêter. On a repris l’enregistrement des voix au moment du dé-confinement dans le petit studio que Cam s’est fait chez lui, en mai.
Camille BELIN : Singulier c’est clair! Tout d’abord à cause du confinement, mais aussi par le postulat de base pour l’enregistrement de ce disque, qui était de prendre le temps. Tout a été enregistré à la maison et cela nous a permis de faire des sessions étalées dans le temps, parfois éclatées car tout le monde n’était pas là tout le temps, mais le résultat nous semble tout de même frais et cohérent. C’est un disque qui a été fait avec tellement peu de stress et de pression que je trouve qu’il est facile d’y retourner, il ne m’évoque que de chouettes souvenirs musicaux et amicaux.
Benoît CHEVALIER : Quand est arrivé le confinement, on avait bouclé seulement 4 chansons sur les 10 pour reprendre les sessions de chants fin mai. C’était un peu frustrant car on était parti sur une bonne dynamique et Jay avait commencé à mixer les morceaux finis. Il nous a fallu attendre 3 mois pour tout boucler. C’était vraiment une période particulière car on savait qu’on avait ce truc à finir avec la possibilité de le faire, mais on était cloîtrés chez nous. Ça ne nous a pas empêché de se pencher dessus. Pendant le confinement on a pas mal échangé à distance avec Cam sur les textes des morceaux à finir, ça nous a permis de bien les peaufiner et d’être prêt pour le retour en studio.
Comment définiriez-vous votre son ? Vous arrivez à obtenir un équilibre très singulier. A la fois violent mais aussi délicat.
Alexandre RAUX : Je ne saurais pas trop dire, assez heavy, avec beaucoup d’influence 90’s évidemment mais pas que. En effet il y une espèce de douceur dans cette musique de bûcherons !!
Etienne BELIN : question difficile !! De l’indie-rock ? De la pop fuzz ? Bref, je sais pas, effectivement, on y met beaucoup de nos influences qui sont très ancrées dans le rock à guitares 90’s et 00’s… Cam et Alex jouent une base rythmique puissante, en distillant des grooves et des patterns rythmiques pour chalouper des fois :) Puis à nouveau les guitares sont en open de SI, donc assez basses. On les joue dans des fuzz donc assez grasses en plus. Après les compos restent très pop dans les mélodies (on ne se refait pas), avec des structures parfois légèrement alambiquées rythmiquement et ambiantes mais où l’on retrouve le bon vieux couplet/refrain quand même. Et puis, surtout, le chant de Ben est mélodique, souvent posé, parfois rageur mais pas hurlé !
Votre souvenir préféré de l’enregistrement ?
Alexandre RAUX : Quand on a repris les prises de voix, sous les toits, chez Cam, avec une chaleur bien présente, on peut le dire, que l’on a réécouté tous les morceaux juste en mise à plat et que ça sonnait déjà !
Etienne BELIN : y’a un moment où on a sorti une vieille basse violette (la première basse de Germain bassiste Daria), on l’a accordé en SI elle aussi, branchée dans le Marshall à travers la fuzz ! Ca faisait trembler le pantalon et on a fait des prises avec pour alourdir par endroit !
Aussi, comme nous n’étions pas toujours ensemble lors des prises, moi je garde un super souvenir lorsque j’ai entendu « A serious weakness » pour la première fois avec toutes les prises… Frissons…
Camille BELIN : Ce n’est peut-être pas un souvenir précis en particulier, mais ce que j’ai préféré dans cet enregistrement c’est de voir comment, petit à petit, les chansons qu’on faisait tourner depuis plus ou moins longtemps -voire même jamais tous ensemble pour certaines (happy burial par exemple)! – ont pris forme et se sont développées au fur et à mesure pour devenir ce qu’elles sont sur ce disque. Parfois, j’ai l’impression que malgré notre contrôle en tant que musiciens, moi en tant qu’ingé son etc… la chanson finit là où elle veut aller, comme si elle avait une vie propre. Ça sonne peut-être un peu curieux ou ésotérique mais je crois que j’y crois un peu, ahah !
Benoit CHEVALIER : Pas non plus de souvenir en particulier, plutôt la satisfaction, comme Cam, de voir ces morceaux mis en boîte, les voir prendre forme et entendre le résultat des oreilles de Jay et vraiment les apprécier. Il y a des choses qu’on aime faire, en particulier sur les secondes guitares ou les percus… Aller explorer des choses qu’on ne reproduira pas forcément en live, le fait d’arriver en dernier et poser les voix sur les instrus et faire évoluer le tout, retravailler tout ça et mettre les idées en commun. Le studio a ce truc du laboratoire que j’aime particulièrement.
Do Not Machine - Heart Beat Nation
Hear Beat Nation des Do Not Machine sera disponible le 20 novembre 2020 chez Twenty Something/PIAS.
- Curious Box
- Heart Beat Nation
- Undertow
- A Promise
- The Host Inside
- Happy Burial
- Serious Weakness
- Futile Values
- Beyond the Trees
- A Grain of Truth