5 questions à … Cuarteto Tafi

Cuarteto Tafi en cinq questions

Votre souvenir de concert ?

Chaque concert est unique, une rencontre avec un public, une commune, une équipe technique, une association, des bénévoles… J’ai le souvenir d’un concert perché dans un petit village d’Ardèche, à Eourres, dans une église ; c’était un moment assez magique, assez bouleversant. À la fin du concert, un homme s’approche de moi et me dit à pleines dents « je suis de ta famille, je suis moi aussi argentin et mon nom de famille est Harispe, comme le tien !!! » Une rencontre assez folle, je t’avoue, on a dénoué nos origines et comme bon nombre de personnes qui venons de Buenos Aires avons eu des ancêtres français qui, à la fin du XX siècle, ont quitté leurs terres pour en trouver une autre de l’autre côté de la flaque. Le lendemain du concert nous sommes allés manger chez lui et avons partagé un bon bout de steak à la braise, un asado argentin (une grillade), et avons trouvé, avec les yeux pleins de larmes que nous avions de la famille en commun… Comme quoi, la musique rassemble !

Votre rencontre en tournée ?

La dernière rencontre qui nous a marqué à tous les 4 fut celle avec l’artiste Leila Martial. Cette femme nous a accompagné durant toute notre carrière d’artiste à travers son univers, son parcours, ses musiques. L’an dernier, nous avons eu le bonheur de la croiser et de lui proposer de venir chanter avec nous sur un morceau que nous présentons dans ce nouvel album, Yo Soy El Indigo. La journée d’enregistrement fut un des moments les plus fous et forts de l’année ! Elle est d’une grâce naturelle, humble et honnête mais surtout une virtuose de la voix !

Votre anecdote dans le van ?

Mis à part les crevaisons en pleine autoroute, les coffres de voiture mal fermés qui s’ouvrent avec les instrus dedans et qui atterrissent par terre, et les tempêtes de neige et pluie le soir en rentrant de concert, je me souviens surtout d’une fois où j’avais demandé à Ludo et à Mateito de sortir leurs bouzouki et guitare et de nous mettre à chanter du folklore argentin à tue-tête avec la voix cassée des lendemains de concert en ayant peu dormi…

Votre single El Canto del Sur en quelques mots ?

Ce morceau est né suite aux évènements sociaux qui se sont produits au Chili en décembre 2019 dernier : des milliers de personnes, d’hommes, de femmes se sont retrouvés dans les rues du Chili et ont manifesté, crié, chanté justice sociale. Nous étions ici en France et nous regardions émus et bouleversés tout ce peuple qui chantait des chansons de Victor Jara, qui retransmettait des discours de Salvador Allende et qui réclamait une nouvelle constitution en se débarrassant des carcans dictatoriaux de Pinochet. Les femmes argentines viennent d’obtenir, suite à une mobilisation sociale historique, le droit à l’avortement. Cet évènement s’est aussi glissé dans les paroles de ce morceau qui dit que la force du sud vient de la rue !

Votre prochain rêve ?

Retrouver rapidement la scène, notre public, se produire et retrouver cette sensation tellement libératrice et jouissive qui est le fait de jouer nos morceaux sur scène devant un public attentif, sincère et prêt à se lâcher avec nous !

Cuarteto Tafi – Canto Del Sur

Mis pies descalzos caminan sobre mi tierra roja y colorada,
De mi espalada surgen los caminos de mis Andes combativos,
Mis manos curtidas con tiempo y cansancio acarician las montañas del Perú,

Buscan la luz, el canto del sur.

Mi cabello, negro y colombiano amanece con ansias de explorar,
Mi panza blanca, alza la danza, mi ombligo tiene ganas de volar.
Mis brazos abrazan los lagos, que guían mis pasos bolivianos.

Buscan la luz, el canto del sur.
Porque llueve…

Mis uñas acarician el aroma del monte, campo y yerbal.
Dibujan el sudor del mar y aroma.
Maizena y cañaveral.

Viene la marea, se viene la marea; La fuerza del sur es callejera. América desatas mis venas…

Mis ojos, mis ojos son los soles que calientan mi río.
Mi boca, mi boca jujeña me quita el frio.
Canto encima de tus venas, rojas y abiertas.

Busco la luz, el canto del sur.

Mis pechos, se enamoran de las calles con ruido,
y encuentro en cada rincón el calor de mi gente, mi nido.
Donde estas, donde están las mujeres de mi tierra ?

Me vai a decir que están muertas.

Viene la marea, se viene la marea; La fuerza del sur es callejera. América desatas mis venas…

Todas las tierras del Sur,
Sudan sobre nuestra piel, cae sobre mis pies.
América desata mis venas…

En écoute avec Cuarteto Tafi

1. Vivir Quintana – Canción sin miedo ft. El Palomar
   Morceau emblématique de la lutte des femmes en Amérique latine pour dénoncer les féminicides. Cette chanson a une puissance qui te prend tous les organes de ton corps pour les retourner et les remettre à sa place, mais avec une pointe de rage et d’amour aussi.
2. Susana Baca – Negra Presuntuosa
   Susana Baca est une des chanteuses d’Amérique latine des plus représentatives du mouvement musical afro-péruvien. Elle est un symbole de beauté, d’humilité et de résistance.
3. Lila Downs – Zapata Se Queda
   La musique de Lila Down est syncrétique, métissée, colorée et sombre à la fois, un mélange des cinq sens qui est assez unique dans le monde la musique, à l’image de son pays, le Mexique. Attention ! Elle possède un timbre de voix et une tonalité grave capables de vous faire trembler les veines !
4. Sara Hebe – Movimiento Social El Deseo
   Cette femme est une révolutionnaire, elle casse les codes, interroge, questionne. Son engagement politique et militant est entier, c’est pour ça qu’elle me touche, parce qu’elle fait de sa musique un véritable outil de lutte pour changer un monde trop machiste.
5. Calle 13 – Latinoamérica
   Ce morceau est devenu une sorte d’hymne à l’Amérique latine, il devrait, je pense, remplacer bon nombre de chants nationaux ! Il est un hommage à ces peuples qui se relèvent après des années de dictature, d’exploitation, d’asservissement, de maltraitance. Un peuple digne qui, même sans jambes, se relève toujours.
6. Keny Arkana – Victoria
   Je suis extrêmement reconnaissante des femmes qui chantent des styles musicaux généralement destinés aux hommes, ou du moins commercialisés pour et par les hommes. Et pour ça et pour sa résistance j’admire Keny Arkana.
   Mais aussi c’est que je m’appelle Victoria, Leonor Victoria ! Ce morceau raconte aussi un peu mon histoire. Mes parents, syndicalistes et professeurs se sont exilés lors de la dernière dictature argentine. Ils ont trouvé refuge dans une France qui accueillait les réfugiés politiques. Grâce à leur combat, j’ai construit avec ma sœur et mon frère une vie sereine, dans un pays démocratique.
7. Pixvae – El Curruco
   Nous avons eu la chance de rencontrer ce groupe franco-colombien quelques fois. On aime beaucoup l’originalité de leur proposition, cette fusion entre trad et modernité nous a interpellé et fait bouger le corps et l’âme !
8. Sílvia Pérez Cruz – Vestida de Nit
   Cette artiste catalane est une des dernières découvertes que j’ai faite et qui m’a littéralement émues aux larmes, de part sa voix, sa créativité, sa simplicité et sa beauté.
9. Natalia Lafourcade – La Malquerida
   Véritable moment de grâce et de communion entre les femmes, ce morceau est une parenthèse dans la vie, une respiration, une caresse à l’âme, une invitation à la sororité.
10. Mercedes Sosa – Canción de las simples cosas
    Parce qu’une playlist sans une chanson interprétée par l’immense Mercedes Sosa, sans sa voix, sa sensibilité, sa force, n’est pas vraiment une véritable playlist ! Sa voix me ramène à mon enfance à Buenos Aires, à la voix de ma mère, aux soirées avec les copains en France pendant leur exil, cette voix est une madeleine de Proust faite de doux souvenirs et de nostalgie.
11. Leïla Martial Baabox – Oh Papa
    C’est le premier morceau de Leila Martial que nous ayons découvert, cette création est un chant polyphonique qui vous pénètre le corps, bouleverse toutes les croyances que vous ayez et vous ramène sur terre une fois le voyage fait, plein d’amour et de larmes.
12. Gotan Project – Queremos Paz
    Tout l’album La Revancha Del Tango de Gotan est un véritable bijou, de part sa créativité et son originalité. Le groupe a fusionné l’impossible et a réussi à inventer un style musical qui est devenu leur marque de fabrique, tu reconnais le style Gotan dès les premières notes. C’est en ça qu’ils sont géniaux !

Visiter la page Facebook de Cuarteto Tafi et leur site : www.cuartetotafi.com
El Canto Del Sur avec Deep Kelins & Matthieu Saglio est extrait d’Amanecer à paraître le 19 mars.
Cuarteto Tafi sera en concert le 26 janvier au festival Au Fil des Voix et en livestream.