E-Riser en cinq questions
Ton endroit préféré pour composer ?
Sans doute ma tête (rires). À la vérité, je ne sors quasiment jamais de mon studio d’enregistrement, qui est aussi ma salle de rédaction. Il y a l’énorme Raven Mti Dual Core de Slate audio au milieu, plein d’écrans, de machines, de leds, de claviers… C’est mon environnement. Je n’ai pas besoin d’un décor particulier pour être inspiré. Tout se passe dans ma tête quand je ferme les yeux.
Ton film de référence pour t’évader ?
À la base, je suis très cinéphile et je vis une relation fusionnelle avec ma femme qui est réalisatrice. Je compose toutes ses musiques, elle réalise mes clips et écrivait mes paroles avant que je me tourne vers l’instrumental. Pourtant je ne m’évade pas avec le cinéma. C’est un motif de réflexion, mais rarement d’évasion. Mais il y a un film qui m’obsède depuis des années, sans que l’on puisse prétendre qu’il invite à l’évasion. C’est Take Shelter de Jeff Nichols (un de mes réalisateurs actuels préférés), avec William Shannon et Jessica Chastain. Mais pour l’évasion, j’aimerais juste arriver à voir Deux Frères de Jean-Jacques Annaud, avec ma fille. Mais elle refuse de voir des films autrement que seule. Peut-être un jour, mais sans doute sera-t-il trop tard pour ce film. Et sinon, ce sont les documentaires scientifiques ou historiques que je regarde avec ma femme. Le problème est que, travaillant 7 jours sur 7 et de plus en plus tard, les occasions se font rares.
Ta bande-originale culte ?
Je ne sais pas si elle est culte, mais je dirais celle de There Will Be Blood de Paul Thomas Anderson, composée par Jonny Greenwood, le guitariste de Radiohead. Et il y a toutes celles de Trent Reznor et Atticus Ross pour David Fincher. Mais à la vérité, dans les dernières années, sous la pression des productions Marvel, les vrais thèmes se sont effacés au cinéma. Ce sont les séries qui en profitent. De ce point de vue, la musique de Game of Thrones de Ramin Djawadi est exceptionnelle. Et c’est un juste retour des choses, sachant que, justement, il doit composer de la soupe pour les Marvel. Et, dans la série, le titre, The Rains of Castamere (dans la version de Sigur Rós) est magnifique. Il y a aussi le travail de Jeff Beal qui me parle vraiment, et notamment le générique de House of Cards, que je considère comme un chef-d’œuvre.
Sigur Rós - The Rains of Castamere (Game Of Thrones)
Ton clip Corentin Crew en quelques mots ?
C’est l’histoire de l’album, dont chaque titre est composé sur la base d’un scénario de film imaginaire et, là encore, de ma relation avec ma femme. Corentin Crew, c’est un souvenir personnel d’un moment difficile à l’hôpital Corentin Celton, il y a quelques années. J’y avais rencontré une bande incroyable avec laquelle le feeling est immédiatement passé. J’ai imaginé la manière dont les patients d’un hôpital arrivaient à se libérer de leurs névroses par la musique. Jay (ma femme) a pris cela à son compte et lui a donné un tour lynchien. Quelque chose qui nous parle à tous les deux. On a discuté des personnages, en dehors du mien et du sien (la fille au kaléidoscope), parce que j’avais envie qu’elle y soit physiquement. À partir de là, les choses se sont déroulées selon le mode classique avec un casting, dont je suis très content, qu’elle a effectuées seule. Quant à l’équipe, elle a pris la sienne, notamment son chef op habituel, Florent Zarka et son chef déco de prédilection, Hugo Raffoul de Comarmond, qui étaient déjà à la baguette dans le clip Fa-Tality. Ce sont des gens avec lesquels j’adore travailler. Ils sont hyper motivés, très sérieux sans se prendre au sérieux, démerdards et très vifs (je déteste la lenteur, l’inefficacité et la mollesse).
E – Riser – Corentin Crew
Ton futur album Electronica Cinematic ?
Futur album ? Il est terminé depuis an et j’ai déjà bien avancé le suivant (rires). Comme je le disais, tous les titres (sauf Quarantine) se fondent sur des films imaginaires. C’est pour cela que je le définis comme une rencontre entre la musique de film et le dancefloor. Certains titres sont plus marqués par le cinéma et d’autres par l’esprit club, mais tous partent des deux postulats. À la base – faut me dire si je me répète, hein ? -, c’est encore une histoire avec ma femme. Elle n’écoute quasiment que de l’électro, alors que pour moi, c’est la musique de mes débuts, avant que je travaille particulièrement le rock et la musique orchestrale. Mais à force je me suis mis à m’y raccrocher totalement et aussi à ne plus que me mettre ça dans les oreilles. Alors, j’ai eu envie de composer un album pour elle, pour souligner deux aspects de sa vie, le cinéma et la musique électronique. Et, comme tu le verras dans la playlist, je suis très sensible à la scène française actuelle, comme Rone, N’To, Joachim Pastor, Laake, mais aussi aux aînés allemands que sont les frères Kalkbrenner ou Moderat. Et puis, il y a certains tenants de la musique contemporaine qui sont toujours présents dans un coin de ma tête en termes d’inspiration, comme Steve Reich, Philip Glass, Arvo Pärt et ce genre de compositeurs.
La playlist de E-Riser
En écoute avec E - Riser
En écoute avec E - Riser
En écoute avec E-Riser
L'un des titres que j'ai le plus écoutés ces dernières années. À la fois sombre et entraînant, un paradoxe qui me va parfaitement. de vue, mais j'aime cette musique.
Pareil. Danser en réfléchissant, c'est monstrueux. À noter que j'ai aussi une grosse appétence pour son travail entre électro et orchestral qui entre en résonance avec certaines choses que je fais.
C'est un peu la même chose qu'avec Rone, la force, la douceur, la profondeur, le groove hypnotique. Et pourtant, je pense être très éloigné de ces gens à tous points de vue, mais j'aime cette musique.
Un de mes titres préférés tout court. Un artiste vraiment atypique dont l’œuvre dégage une profondeur et une puissance rare. Moi qui suis un solitaire total dans le travail, il est sans doute un des rares avec lequel j'aimerais travailler. Son dernier album O, est également une merveille en plus d'avoir été enregistré dans mon ancien studio
Une chanson sublime, avec un arrangement minimaliste juste parfait et la voix la plus adaptée. Et puis, voilà. J'ai composé un morceau en hommage à mon ami, le chanteur transformiste, Thomas Polly, qui s'est suicidé juste avant le premier confinement. En fait, c'est lui, Laura.
Cette reprise de Leonard Cohen (un de mes héros), utilisée dans le film DC Comics Justice League, explose l'originale. Ça met les poils, c'est tout en tension retenue jusqu'à l'explosion finale. Les poils...
C'est elle que j'aurais dû mettre dans mes B.O cultes. Mais je la mets ici, en intégralité. Quand je l'écoute, je ne suis plus là.
Un titre qui me bouleverse à tel point que je vais bientôt en sortir une reprise. Il est dédié à sa fille, comme je le fais pour la mienne (mais également à ma femme qui me l'a fait découvrir).
Cette chanson est tout en haut de mon Panthéon, par son texte (mon obsession du mythe de Faust dont elle parle), son arrangement, sa mélodie et le fait que Joe Jackson soit à la base de ma carrière musicale. Je préfère mettre ce lien de l'original plutôt que la vidéo live moyenne qui se trouve aussi.
Autre chanson dont j'ai déjà enregistré une reprise. William Sheller m'a donné un coup de pouce au début. Et surtout, ce titre raconte au détail près un épisode de mon enfance et me colle à la peau.
Pour le gag et pour montrer que jadis je chantais, c'est ma version live à la maison pour le service de marques d'instruments virtuels avec lesquels je travaillais que je vous mets en lien. Un des titres qui m'accompagnent depuis l'adolescence. Nous sommes très loin de mon travail électro actuel.
Celle-là aussi je l'ai enregistrée. Je pourrais en réalité mettre tous les titres de Lou Reed, tellement cet artiste a compté dans ma vie.
Le nouvel album de E-Riser, Electronica Cinematic sortira en janvier 2022.
Plus d’informations sur la page Facebook de E-Riser.