Nicolas Tarik en cinq questions :
Ta dernière chute libre ?
Je peux parler de la prochaine, je saute en parapente bientôt. C’est un baptême qu’on nous offre à ma mère et moi. Elle a 75 ans. J’ai hâte de lui chanter « My mom in the sky with diamonds » en plein vol !
Que fais-tu de ton temps libre ?
De la musique ! Je compose dans différents styles, du plus classique au plus urbain. J’écoute pas mal d’amapiano en ce moment, qui est une des tendances de la house sudafricaine. Je vois mes proches, je voyage, j’étais en Algérie en mai dernier. Sinon, je vais au lac, je me ballade en vélo, j’aime bien ramasser des fruits sauvages, préparer des confitures et faire du pain.
Ta dernière évasion ?
Mes vacances cet été étaient une merveilleuse évasion. Je n’avais rien prévu, rien calculé, ni rien réservé. J’ai fait des rencontres inattendues (on a créé les « poneys poneys », un groupe de rock indé imaginaire avec Sèbe le chanteur et Pandore lors d’un trip avignonnais), vécu intensément des festivals, je me suis plongé dans la nature provençale. J’étais à moins de 3 heures de chez moi en train, mais c’était un vrai lâcher-prise. J’étais vraiment disponible à ce qui se passait et pour les personnes avec moi. Parce que le reste de l’année, je me consacre principalement à la musique et je n’ai pas cette disponibilité-là.
Ton symbole de la liberté ?
J’associe souvent la liberté à la nature, au monde sauvage et aux grand espaces. Mais la liberté c’est peut-être une cage dont la porte est grande ouverte. Quand tu as la chance de pouvoir choisir avec qui et de quelle manière tu est relié.e aux autres. Dans beaucoup de cas, l’amour s’accompagne de peurs profondes. En parler, communiquer, constater nos failles (les chansons peuvent parfois servir à cela), c’est un premier pas pour créer les conditions d’un équilibre dans les relations qu’on tisse entre amant.e.s / amoureu.x.es / ex-amoureu.x.e.s, etc. La liberté n’est pas donnée d’emblée, ce n’est pas quelque chose qu’on prend aux dépens de l’autre, elle demande un effort et elle n’est possible que si tou.te.s les partenaires sont libres ensemble. Ca n’est pas facile, ça me semble en tout cas un bel idéal, ça implique de chercher ces équilibres ensemble, dans le couple et, au-delà, dans toutes les sphères sociales.
Ton album en quelques mots ?
L’album s’appelle Gibraltar qui vient de « djebel Tarik », la « montagne de Tarik » en arabe. Tarik est mon deuxième prénom, c’est un prénom caché, je l’ai choisi comme nom de scène sans trop réfléchir au départ. Mais ce prénom résume quelque chose dans ma vie comme une équation que je cherche à résoudre. Je suis parti de là et de la chanson éponyme pour convoquer mon enfance et en tirer des réflexions sur le rapport aux autres (Les Sandales blanches), sur l’amitié (la chanson Un ami), sur les souvenirs (avec Nord). Il y a la chanson Fils à maman pour ma mère qui nous a élevés avec ma sœur à Lyon, avec l’aide de ma grand-mère et de ma tante. J’ai aussi une sorte de lettre ouverte à mon père algérien que je connais moins bien et qui vit près d’Alger avec mes demi-sœurs et mon demi-frère. Il y a aussi un titre pour ma ville, la ville de Lyon, que j’ai redécouverte avec bonheur en rentrant en France après quelques années dans l’océan indien, il y a plus de 4 ans maintenant.
J’ai travaillé avec Leïla Soldevila à la contrebasse, Christophe Chrétien à la batterie et Stéphane Piot au son. J’ai également invité en featuring des artistes internationaux comme Samira Brahmia, Amine Soufari, Jerry Léonide et Pierre Colombet. C’est une manière de réunir à travers eux, certaines des musiques qui me bercent et m’influencent : classique, jazz et musiques dites du monde. On sort l’album à la Salle Barbara de la MJC Montchat le jeudi 24 novembre prochain. Ca va être une grande fête, j’ai hâte de partager cela avec toi et avec les lecteurs de Soul-Kitchen.
Gibraltar de Nicolas Tarik sort le 24 novembre à la Salle Barbara de la MJC Montchat (Lyon) en partenariat avec Agend’arts et Néômme. Vous pouvez acheter vos places sous ce lien, les 30 premières places sont à un tarif préférentiel avec ce code promo, SLKTCHN69, 10 € au lieu de 13 €.
Nicolas Tarik – Libre
Moi je voulais être libre
comme le vent
Dansez sur les rives
des grands sentiments
Cueillir les fleurs de l’âge
éviter les tourments
Éviter le surmenage
rester amants
Ne pas lire les secrets
que son jardin recèle
Ne pas voir son côté
un peu irrationnel
Je voulais les embruns
sans quitter la terre ferme
Mais j’embarque quand se touchent
nos épidermes
Finalement je suis libre
de la vouloir passionnément
Finalement je suis libre
vraiment
Je ne l’ai pas cherchée
ou bien pas consciemment
Dans mes paumes écorchées
une pépite, un diamant
Elle s’en va, se rhabille
Elle le fait calmement
Des signes s’épanouissent
sur ses flancs
Ses yeux sont deux mystères
deux disques incandescents
Moi je parle pour taire
ce qu’au fond je ressens
Elle me demande alors
« Demain t’es libre quand ? »
Et mon pouls bat plus fort
qu’auparavant
« Oui je suis libre, on dit 20h ? »
Finalement je suis libre
de la vouloir passionnément
Finalement je suis libre
vraiment
Je croque son sourire
qu’on dirait permanent
Pourra-t-elle guérir
de ce mal rémanent
Que je crois je devine
Elle se confie rarement
Elle est du genre à vivre
à pleines dents
Nous sommes ébréchés
est-ce un hasard vraiment
si on s’est rapprochés ?
Je ne crois pas les voyants
Mais je sais qu’éméchés
quand ensemble on s’étend
Je dois souvent lécher
ses blessures doucement
Finalement je suis libre
de la vouloir passionnément
vraiment
La playlist de Nicolas Tarik
J’ai passé quelques jours avec Ballaké Sissoko l’année dernière. Plus qu’un virtuose malien de la kora, c’est un explorateur musical. Quant à Piers Faccini, je l’ai entendu dire : “je ne fais pas de la musique pour me trouver, je fais de la musique pour me perdre”. Je reviens constamment au duo de ces deux maîtres.
Il est une des voix qui me font vriller, je l’ai vu à Vienne, on était très peu nombreux dans une grande salle.
Comme dirait mon ami Chris Le Hache, Bob Dylan c’est la base.
On a perdu Anne. Je ne connais que ses chansons, mais je pense que pour celle.ux qui écrivent de la chanson francophone, c’est comme perdre une amie, de celle qui nous donne du courage quand on aurait été tentés de baisser les bras.
Samira Brahmia a posé sa voix et ses mots sur “Gibraltar”. C’est une des grandes voix de la diaspora algérienne en France. Elle vient de sortir un nouvel album.
Pierre Colombet est le violoniste du Quatuor Ebène, double Victoire de la musique classique. Il a accepté d’arranger les cordes pour l’album “Gibraltar”. C’est quelqu’un de très gentil, qui te pousse à t’améliorer constamment, c’est aussi un fan de Philippe Katerine. Bref une des très belles rencontres de l’album.
Quand je vivais dans l’océan indien, Menwar est des artistes mauriciens que j’ai le plus écouté, j’adore le titre Lotis - qui n’est pas sur spotify. Il a commencé sa carrière avec des titres comme celui-là.
Je suis parti en 2015 au Cap-Vert, j’ai vu la maison de Cesaria Evora et pour moi c’était comme un pèlerinage.
Ce titre de Radiohead tourne selon une construction pyramidale. Je peux bloquer des heures à écouter ce titre.
J’ai travaillé dans la lutte contre les exclusions avant de me consacrer à la musique. Kenny Arkana témoigne et ça me broie les tripes que derrière les termes institutionnels de “protection” ou d’”aide” puisse se cacher parfois de telles dérives