Marcia Higelin & Florent Marchet @ L’Aqueduc – Dardilly | 27.01.2023

Florent Marchet nous invitait à sa Garden Party ou plutôt sa fête entre amis avec son dernier album entre tendresse et brutalité, chroniques du temps qui passe, polaroids d’une vie parfois violente que l’on se prend dans les dents comme avec la sublime, Comme il est beau. Freddy Mercury nous laisse une fois de plus groggy d’humanité et devrait être au programme de toutes les écoles. Nous aussi on hésite entre l’éclaircie ou l’incendie, il faut faire fi du monde qui nous dégoûte en célébrant la fraternité de Florent.

On ne peut résister aussi à cet extrait de son journal facebookien, éphéméride funambule, road book burlesque, manuel philosophique « d’un boudoir à l’autre ».

« Pause sur l’Aire de Saint-Agoulin, Auvergne. Le diable Total la totale nous accueille avec son cynique « bonjour » qui sourit. Le soleil est pâle à midi, c’est l’hiver demain, chantait monsieur William. Je marche dans la neige parfaite. Bienvenue le froid. Enfin le givre, enfin le ciel laiteux et opaque. Aujourd’hui, direction le Festival des Nuits Givrées. C’est cohérent. Dormi 4h. Plus tôt, nous avons quitté Tours avant qu’elle n’éteigne ses lumières municipales. Les yeux rougis. Café à la machine. L’écran nous propose par défaut un café sucré. Valider un autre choix. Avant que le liquide marronnasse ne tombe dans le gobelet cartonné, ultime tentative de l’industrie agroalimentaire : Désirez-vous une barre chocolatée avec votre café ? Mais t’imaginais quoi !?

Arrivée sous le poids de la fatigue à Dardilly. Nous faisons la connaissance de Pablo, un jeune garçon souriant et concerné par sa mission d’accueil des artistes. On le sent immédiatement (l’expérience que voulez-vous). Il nous conduit dans la salle à manger de L’Aqueduc. Yannick, un grand gars un peu chevelu comme moi (mais moins quand même) nous ouvre la porte. Un programmateur des lieux qui se présente, qui vous reçoit et ce dès votre arrivée, ça fait plaisir. L’équipe technique est déjà attablée, deuxième jour de festival, il faut reprendre des forces. La cuisine est plutôt bonne. Voulez-vous un œuf parfait ? Tiens, je connais l’œuf à la coque, dur, au plat, mollé, mimosa, poché, brouillé, crémeux, frit, marbré, en omelette… mais pas parfait. On m’explique qu’il s’agit d’une cuisson à basse température, 64 degrés pour être précis.

Yannick, le programmateur, me raconte la soirée de la veille, avec Albin de la Simone et l’ensemble Contraste. On évoque le prochain album d’Albin. Je fais un peu le malin parce que j’ai eu pu écouter en avant-première « Les cent prochaines années » (c’est le nom du nouveau disque). Tellement beau. Encore une chance pour la chanson. Le 3 mars vous allez découvrir Mireille 1972, Merveille, Petit petit moi… Beauté Albin.
Arthur, notre ingé lumière et régisseur (une sacrée mission au passage) me dit qu’une chambre d’hôtel est disponible à 5mn de la salle. Je vais pouvoir me reposer deux petites heures, le temps que l’équipe installe le décor. Dans ma chambre, je décide, avant la sieste bien méritée, de préparer mon petit speech sur la ville.

Aujourd’hui c’est Dardilly. Ça ne devrait pas me prendre trop de temps, la banlieue, en générale, déchaîne les foules les plus chafouines et réactionnaires. Je tape « ville idéale.fr ». J’épluche tous les commentaires. Jusqu’à la dernière page. Stupeur, déception, incrédulité. Rien. Non vraiment. Que des bonnes notes, que des commentaires élogieux à part des petits problèmes d’embouteillages un lundi matin. Rien de bargeot, de crétin qui nous aurait fait rire. Je décide pour la première fois depuis le début de la tournée de tricher. Tant pis, je vais aller sur les pages des banlieues avoisinantes. Pareil ! Ce n’est pas possible, ils se sont passé le mot. Je décide de faire une micro-sieste afin d’oubli momentanément cette déconfiture. Finalement, sur les conseils avisés de Yannick, je finirai par aller sur la page de Lyon 1er arrondissement pour trouver mon bonheur. Émilie et Séverine de l’accueil me le confirmeront : ici les gens sont globalement heureux. Merde, mais qu’est-ce que je fous là alors ?

Balance plus longue que d’habitude. La salle est belle mais très mate. Antoine, notre ingénieur du son, est un grand perfectionniste. Alors il marmonne, râle, peste, intérieurement il va de soi, le garçon sait rester élégant en toutes circonstances. On le sent toutefois fébrile. Et hop, encore un café renversé. Et qui nettoie hein ? Allez, Raphael bien sûr. Laissez-le, il adore ça.

Rencontre à 19h avec l’association « Les enfants du Rhône ». Trois ados avec micro qui découvrent les joies du journalisme. Excellentes questions ouvertes. Bravo.

Concert étonnamment très détendu malgré une concentration plus forte que d’habitude avant de monter sur scène. Peur d’être victime de la fatigue. Public adorable, comment le dire autrement. Public debout à la fin, public câlin et maniant parfaitement le second degré. 3ème mi-temps avec ce public aimant. Derrière mes disques, un verre à la main. Des échanges émouvants, particulièrement troublants ce soir-là. Merci Pablo pour ton aide précieuse, ton accompagnement tout au long de la journée. J’étais ravi d’échanger avec toi sur l’industrie du spectacle, les multiplexes anxiogènes, la culture au kilo. Soulagé de savoir qu’il existe des gens comme toi pour prendre le relais. Tout n’est pas perdu.

Il est tard, 1h passée. Livio, notre chauffeur pour cette date, nous presse. Il a raison. Nous ne dormons pas sur place ce soir puisque nous prenons la route en direction de la Bretagne. Nous ferons une courte halte à Bourges, plus tard dans la nuit, un hôtel en bord d’autoroute. 4 petites heures après, nous repartirons. Les amis bretons nous attendant de pied ferme, notamment une bande d’amis de Portsall. On a hâte. Une fête de voisins à Saint-Martin de Champs (près de Morlaix), ça ne devrait être pas mal. »