MEGAMUSTANG

Mustang © Minhia Defoy
Le cinquième album de Mustang, M​É​GAPH​É​NIX vient de sortir chez Vietnam et c'est leur Méga chef d’œuvre. La plume acérée de Jean Felzine déchire la chanson en français et renvoie tous les autres en division d'honneur.

En attendant de vous reparler de cette merveille, nous publions un texte du « jeune gens moderne » Jean-Pierre Théolier (Seconde Chambre) sur l’un des titres du disque, l’argent du beurre. Jean Felzine précise, « je voulais montrer une version effrayante, menaçante de la foi. Je sais pas pour les gars, mais moi chaque fois que ça va trop bien je me dit que le ciel va me tomber sur la tête, ce qui arrive d’ailleurs généralement ».

On ignore si le ciel est tombé sur la tête de Jean-Pierre Théolier à l’écoute de ce titre, mais ce qui est sûr c’est que ce morceau lui a inspiré un texte personnel et baroque auquel on adhère. On espère in fine des Victoires Prochaines pour Mustang dans le cloaque de la chanson française.

Discographie

Mustang Par Marie Planeille
Mustang © Marie Planeille
« Il faut savoir désespérer jusqu’au bout », écrivait Roger Nimier, et c’est ce qui m’est venu à l’esprit en écoutant le titre de Mustang. Heureuse surprise et bonne nouvelle, cette ballade : il serait possible de voyager jusqu’au bout de la Nuit, à travers les médiocrités, les bassesses, les horreurs de toutes les guerres, qu’elles soient ordinaires et mercantiles (l’acte désintéressé, capteur de lumière : diamant perdu dans des tonnes d’anthracite) ou industrielles et mondiales. Il serait donc possible, dis-je, d’atteindre une lucidité, non plus froide comme un procès-verbal, un constat d’accident, mais qui, venue d’un cœur de chair, s’apparente vivement à l’humilité.

Le texte est « clivant », paraît-il… Tu m’étonnes : quelqu’un peut-il, sans ricaner, prétendre que l’humilité compte au nombre des valeurs contemporaines ? OK, ça n’a jamais été le cas, n’idéalisons pas le passé : l’orgueil (corollairement stupide si l’on considère que l’intelligence est empathique) est un vieil adversaire, homicide par nature. Dès l’origine. Du plus profond. À la racine. À chaque instant, « au milieu du temps »… La faute originelle en somme.

Heureuse surprise, bonne nouvelle ! Pourquoi ne pas profiter de la retraite que je fais au Foyer de charité de Tressaint (Bretagne) : Jonas, la traversée des émotions, pour en parler un peu ?

Appelez-moi Israël. Appelez-moi Israël ? Pourquoi : cliver à fond, provoquer ? Non, parce qu’avec quelques bornes au compteur, ayant parcouru depuis la sortie d’Égypte un petit bout de chemin, notamment dans le désert mais également sur les flots et en dessous, je sais qu’Israël, c’est moi. C’est toi. « Peuple à la nuque raide », est-il écrit dans le Livre. Donc, si l’on me demande d’où j’écris, eh bien j’écris du chemin, de l’exil et de la Terre Sainte. J’écris du monde. Du mien, mais aussi du nôtre. Après, sûr que ça ne plaît pas à tout le monde. Il y a de quoi en faire des psaumes. Des ponts entre l’esthétique et la morale. Alors, le Tout-Puissant, si ma sincérité l’y autorise, travaillera sur les émotions et les sentiments que je lui présente. Si Lui confier colère, angoisse, détresse, joie (l’invisible existe, sous le tissu des apparences et des chatoiements, sous l’ordure, derrière le ciel et même tout ce qui fait écran, t’attend l’éternité), si Lui confier toute cette pâte pour qu’Il la pétrisse, en fasse du bon pain, alors c’est inviter chacun à la même table. Même si on ne sait pas. Même si les néo-païens hébétés que nous sommes ne savent pas distinguer leur gauche de leur droite. Raison pour laquelle Heroin, T.V. Eye, Disorder, par exemple, pour en rester au rock, sont pour moi des psaumes.

Mustang Par Minhia Defoy
Mustang © Minhia Defoy
J’avais entendu Mustang sur France Inter, une fois ou deux, guère plus. J’écoutais cette fréquence durant les confinements successifs, sur une radio bas de gamme à piles, pour diverses raisons sur lesquelles je ne m’attarde pas. L’âpreté des paroles avait retenu mon attention. Mais prenons plutôt deux titres et faisons-en une critique tweetée : « Je m’emmerde » : une réalité, quoi de neuf aux actualités ? Je ne sais pas quoi faire de ma peau, une réalité sociale, celle de l’acédie. « Salauds de pauvres » : allez tous vous faire inclure, tas de losers ! Résumons par cette citation de l’excellent Chicandier : « La condescendance, c’est l’enfer ».

Et puis dernièrement L’Argent du beurre. Si j’osais, je dirais que Mustang est au seuil de l’Église. Provoc encore ? Il s’agit en l’occurrence de la communauté de celles et ceux qui se préoccupent des autres. Qui ont, au moins, le souci de la justice. Qui en doutent, sans parler de la miséricorde, mais ne restent pas indifférents, ni bras ballants. Les démons sont on ne peut plus au courant de l’existence du Créateur, ce sont même des experts en catéchèse, ces savants-là, sauf qu’ils ne pratiquent pas, ne se salissent pas les mains.

Si j’osais (bis), j’encouragerais Mustang. Après tout, c’est du rock. Le rockeur est rebelle, non ? Bon, jouons à diviser l’humanité. Les rebelles se divisent en : ceux qui se révoltent contre ce qui les empêche d’en faire à leur tête (et trouvent leurs aises dans le tohu-bohu bienveillant qui enfle, ce que j’appelle un égout) ; et, j’y reviens, ceux que blesse l’absence de justice et de miséricorde.

Il est bon de se cabrer sous la caresse malsaine des dresseurs et autres illusionnistes.

Jean-Pierre Théolier est chanteur, guitariste de Seconde Chambre (Divine/Brouillard Définitif), auteur de Résidence (Calmann Levy).
Merci à lui.

Mustang – L’argent du beurre

Ce que j’ai construit
Peut finir en cendres
Je chie des mélodies
S’Il ne veut rien entendre
Tous ces mots écrits
Je devrai les rendre

Dieu donne les grâces
Et Dieu les reprend
Quoi que tu fasses
Au milieu du temps

Face à l’autel
Incline-toi
Tu ferais mieux d’avoir très peur crois-moi

Implore le ciel
La clémence du Roi
Tu n’auras pas l’argent du beurre crois-moi

Crois-tu peindre ?
Tu ne tiens pas le pinceau
Il est le vent qui souffle
Et le sang et les os
Crois-tu écrire ?
Ce n’est pas ton stylo
Suis la voie de Celui
Qui marche sur l’eau

Ces sommets gravis
Dans le froid novembre
Valent pas un radis
Il faut redescendre
Car au Paradis
Rien n’est à vendre

Tu veux une médaille
Mais tu n’auras rien
Où que tu ailles
Chante ce refrain

Face à l’autel
Incline-toi
Tu ferais mieux d’avoir très peur crois-moi

Implore le ciel
La clémence du Roi
Tu n’auras pas l’argent du beurre crois-moi

Crois-tu peindre ?
Tu ne tiens pas le pinceau
Il est le vent qui souffle
Et le sang et les os
Crois-tu écrire ?
Ce n’est pas ton stylo
Suis la voie de Celui
Qui marche sur l’eau

Mustang - M É GAPH É NIX

Mustang-pochettealbum-megaphenix

Tracklist : Mustang - Megaphenix
  1. Je ne suis plus aimé
  2. Aérosol
  3. La porte au nez
  4. L'Argent du beurre
  5. Mortification
  6. Chanson française
  7. Tiretaine Amen
  8. Barbelé
  9. Wikipédia
  10. Steve Jobs
  11. Aéroport

Lyonnais qui revendique sa mauvaise foi car comme le dit Baudelaire, "Pour être juste, la critique doit être partiale, passionnée, politique...", Davantage Grincheux que Prof si j'étais un des sept nains, j'aime avant tout la sincérité dans n''importe quel genre musical...
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