Enter Shikari
Ainsi, sur The Mindsweep, on reconnaît dans un premier temps la très réussie Anaesthetist, réelle condamnation du système de santé outre manche à la Prodigy, la positive et plus mélodieuse (mais pas moins complexe) The Last Garrison – avec son récurrent « still alive, still air in my lungs, still blood in my veins » – et Never Let Go Of The Microscope, sorte de nouvelle Tribalism avec son côté rap prononcé mais réussi par Reynolds.
Enter Shikari – Slipshod
Si le reste de l’album est donc une découverte, on admet déjà que l’une de leurs grandes qualités est toujours présente : la diversité de styles musicaux, entremêlés avec brio et logique, est unie par un fil conducteur de l’humanisme, de valeurs sociales défendues avec véhémence, mais également par des mots qui touchent. Musicalement, le contraste There’s A Price On Your Head (dans un premier temps très System of A Down mais à la finalité très Refused) / Dear Future Historians ne laisse pas de marbre mais en tous cas, atteste de la maturité d’un groupe qui a commencé jeune, très jeune, et qui aujourd’hui, est composé d’hommes qui aiment explorer la musique en en condamnant les frontières. Ainsi, There’s A Price On Your Head se fout des codes des classes sociales (« I am lower class, I – I am lower class, Upper Middle lower class, I am upper lower class ; I am living in the past. « We must have structure Mr Reynolds » ») alors que Dear Future Historians continue sur la très douce lancée de Constellations, positive et apaisante .
Le duo Myopia/Torn Apart décontenance au premier abord avec une mélodie portée par une voix de Reynolds très (trop) soignée ; tout ne reste pourtant pas si propre et les deux chansons deviennent une réussite de malaise parce que criantes d’une réalité dérangeante, dépeinte et fabulée avec de tristes archétypes.
Enter Shikari – Anaesthetist
Enfin, comme à leur habitude, les quatre anglais encadrent leur œuvre ; The Appeal & The Mindsweep I & II font donc office d’introduction et de conclusion à un appel à la prise de conscience, nouvelle étape de la construction d’un univers musical à part entière, dans lequel l’expression artistique devient pouvoir et nos quatre musiciens les membres d’une humanité en pleine décadence qu’ils aiment malgré tout.
Enter Shikari – The Last Garrison
Dans un contexte socio-politique oppressant, nos petits explorateurs audacieux, avides d’expériences, deviennent, à travers des discours sinistres et anti-capitalistes, mais également de respect d’autrui et du monde dans lequel nous évoluons et de la connaissance, émissaires. Au final, aucune nouveauté là-dedans, mais le message nous parvient toujours parce que spontané dans sa forme punk. The Mindsweep est d’ailleurs une grande réussite, peut-être davantage que A Flash Flood Of Colour : risqué et intelligent, cet album nous permet des retrouvailles avec Rou, Rob, Rory et Chris, ces jeunes adultes qui, entre deux remerciements pour Noam Chomsky ou George Orwell, n’ont pour autant pas oublié le petit délire entre amis Slipshod.
Et puisque le savoir et l’esprit de chacun sont au centre des attentions du groupe dans The Mindsweep, il semble approprié de conclure ces lignes ainsi : « Nothing was your own except the few cubic centimetres inside your skull » (George Orwell, 1984). Eux auront choisi de clore leurs propos par le proverbe latin d’Horace « mutato nomine, de te fabula narratur » (« change le nom, ce sera ton histoire »).
Enter Shikari - The Mindsweep