Quelle est la genèse de ce disque ? Comment est-il né ?
Raoul Tellier : Il a nécessité un travail d’un an. Les choses ont débuté à la fin de l’été 2014. Avec Helmut, nous sommes partis dans le Cantal une semaine. Puis nous sommes repartis au mois de mars au Maroc. A trois cette fois-ci, Helmut, Alexandre notre batteur et moi. Nous y sommes restés une semaine le temps de peaufiner certains morceaux et d’écrire ce qu’ils manquaient pour faire un album. En juillet, nous avons travaillé avec Yann Arnaud. Nous avons fait une première session studio où nous avons posé les bases des chansons. En septembre, nous avons terminé le disque dans un studio de Montreuil. Nous avons fait de petits ajouts et les voix. Voilà, ce disque a nécessité un an de travail.
Discographies
Arctic Monkeys ★ Beck ★ Benjamin Biolay ★ Blur ★ Father John Misty ★ H-Burns ★ La Maison Tellier ★ Nick CaveComment avez-vous rencontré Yann Arnaud ? C’est la première fois, je crois, que vous avez travaillé avec quelqu’un d’extérieur ?
Raoul Tellier : Non. Les trois premiers disques ont été réalisé avec quelqu’un qui avait beaucoup d’idées, mais pas forcément les moyens pour les réaliser. Mais attention c’était très cool et il nous a mis le pied à l’étrier.
Là, on pensait retravailler avec Antoine Gaillet qui a mixé Beauté pour Tous et notre live Beauté Partout, mais désormais il est très demandé. Le label nous a alors donné une liste de noms. Quand j’ai vu le nom de Yann Arnaud, j’ai dit : c’est lui qu’il nous faut. Il est venu vers nous avec sa vision mais sans nous l’imposer. Il nous a éclairé, chahuté un peu. Disons qu’il nous a sorti de notre modus operandi habituel. Tout en y mettant des gardes-fous.
Et pourquoi ce titre Avalanche ?
Raoul Tellier : A cause de la chanson J’ai rêvé d’avalanche. On a longtemps appelé cette chanson Avalanche. Entre nous, on se fixe des contraintes débiles. Le titre de l’album, cette fois ci, ça devait être un morceau de titre de chanson, mais pas le titre complet. Et puis maintenant, cela fait sens. Sur Beauté pour tous, il y avait un coté slogan. On se bat pour que tout le monde en ait un petit peu. Sur Avalanche, on parle plus de nous.
Et comment s’est déroulé l’enregistrement avec Yann ?
Raoul Tellier : Très très bien. C’est une très belle rencontre. Comme on dit : c’est un chic type! J’ai adoré travailler avec lui.
Vous semblez vous libérer sur ce disque. La Maison Tellier devient hors de contrôle ?
Raoul Tellier : Yann y est a contribué… Il a fait tomber des barrières. On a lâché les fauves. Les textes d’Helmut. sont plus personnels.
Yann y est a contribué… Il a fait tomber des barrières. On a lâché les fauves.
Comme ?
Raoul Tellier : On a eu des envies de rock’n’roll, de solos. Yann nous a un peu tempérés tout en mettant vraiment en scène les moments où l’on pouvait se lâcher. Nous avions aussi encore quelques envies d’orchestrations baroques, sûrement trop riches, comme par le passé. Il a allégé pas mal de choses. Il m’a poussé dans mes retranchements. Il n’est pas musicien, enfin il joue un peu mais surtout il sait très bien indiquer les directions. Cela m’a pas mal décomplexé. Il a réussi à mettre en avant chacune de nos couleurs musicales. D’habitude, je me cache un peu derrière les autres. Sur les solos, il m’a dit: » Vas y, c’est ton moment. T’es là. » Il a aussi mis les cuivres en avant au moment où il le fallait. Nous avons également changé un peu notre écriture. Nous sommes un peu plus rock, moins compliqués. On a regardé du coté des The Black Keys, de H-Burns.
Et la pochette ?
Raoul Tellier : Comme pour les précédentes, c’est Jean Look de chez Phantom, des copains qui ont une boite de graphisme, qui a fait le boulot. Il y avait cette photo d’Helmut. Il nous a fait une proposition qui nous a plu. Nous ne savions pas trop ce que nous voulions. Nous sommes plus sonores que visuels. Et puis toutes les contraintes liées à Internet me dépassent. Il faut que ta pochette soit de telle couleur sinon on ne la voit pas sur le net… Bref, laissons faire ceux qui savent.
Vous aviez des modèles pour ce cinquième disque ?
Raoul Tellier : Moi, toujours. Je pars toujours d’un point d’ancrage, ça change selon les chansons, et après je navigue plus ou moins loin de cette ancre. Là je suis parti des The Black Keys, de Radiohead, de Syd Matters, de Nick Cave… Pour le coté francophone, l’influence de Gérard Manset sur Helmut se fait de plus en plus évidente. On n’essaye plus de le cacher.
Nous avons procédé de plusieurs manières pour mettre tout cela en place. La première session d’Avalanche a eu lieu aux studios de La Frette. Une grande maison du début du vingtième siècle qui te permet d’enregistrer où tu veux. Même dans les escaliers! On voulait faire un truc live. Un peu comme les Fleet Foxes ou Radiohead pour From The Basement. On voulait quelque chose de léché mais de direct. Un album, c’est un peu comme un instantané. L’illustration la plus flagrante, c’est que nous sortons de résidence (pour préparer la tournée qui commence la semaine prochaine), et certaines chansons ont déjà une autre forme. Il y a des choses nouvelles. Tout bouge. Jusqu’à un point d’équilibre, qu’on atteindra… en cours de tournée, j’espère !
Il y a des chansons inabouties ?
Raoul Tellier : Oui. Deux. Enfin, elles ne sont pas inabouties, mais ne figurent pas sur l’album. Nous avions 13 chansons et nous en avons gardées 11. C’était notre cahier des charges. Il y a donc deux inédits qui dorment. On ne sait pas ce qu’on en fera. Il y a deux ou trois autres qui sont encore des maquettes et qui n’ont pas passé le stade du studio. Recalées par Yann. C’était pareil pour Beauté pour Tous, il y avait 3 ou 4 chansons qui n’ont pas abouti. Haut Bas Fragile en fait partie, d’ailleurs. Comme quoi, rien ne se perd, on ne sait jamais ce qu’il peut advenir d’une chanson recalée.
Nous ne sommes jamais complètement à l’aise avec les choses gaies, un peu comme une poule qui trouverait un couteau.
Quelle est l’histoire de Beautiful Again ? C’est ma chanson préférée…
Raoul Tellier : Ah! Cool! Le plan de départ était d’avoir un mélange entre un Bruce Springsteen joyeux et un coté H-Burns (Night moves). On voulait quelque chose de guilleret. Enfin nous ne sommes jamais complètement à l’aise avec les choses gaies, un peu comme une poule qui trouverait un couteau. Nous sommes plus à l’aise avec des choses un peu mélancoliques. Mais je pense qu’on s’en est bien sorti avec celle là. On voulait vraiment qu’elle reste une chanson « simple ». Trois accords, un refrain, un mini pont, peu d’arrangements, basta. Pour le texte, disons qu’il évoque des choses tristement joyeuses. Il évoque le fait que c’est cool d’avoir des gens dans ton entourage pour partager des bons moments et des choses simples, ou t’épauler quand ça va moins bien. Bref c’est la vie à la sauce Tellier. Parmi toutes les chansons d’Avalanche, c’est celle qui me rappelle le plus le Maroc, la maison où nous avons résidé pour composer. Elle se situe tout au bord de la mer, à Essaouira. Ce morceau me rappelle l’odeur de la mer dans le salon, où j’ai passé des heures à chercher ce que je pourrais bien jouer avec ma guitare sur le refrain…
La Maison Tellier – Amazone
Top 10
1) Ton disque préféré de 2015 ?
Raoul Tellier : Facile, enfin… j’en ai trois. Night Moves des H-Burns, Phosphorescent Blue des Punch Brothers et I love you Honey Bear de Father John Misty.
2) Le disque qui va forcément te décevoir ?
Raoul Tellier : Aucune idée… J’allais dire le nouveau Renaud, mais non, en fait. Je n’ai aucune attente, je ne pourrais qu’être agréablement surpris. Alors je dirais peut être le prochain Benjamin Biolay, parce que j’ai tellement pris une claque avec La Superbe… Cela ça va être dur de me faire le même effet. Déjà, Vengeance m’avait un peu déçu.
3) Le disque que tu attends le plus ?
Raoul Tellier: Ben justement, peut être bien le prochain Benjamin Biolay, je suis très curieux. Et sûrement le PJ Harvey, qui sort en avril, je crois. Ou alors le prochain Father John Misty, ou le prochain Beck, mais je ne sais pas quand ils sortent.
4) Le producteur de tes rêves ?
Raoul Tellier: Beck ?
5) Ta B.O préférée ?
Raoul Tellier : Les seules B.O que j’ai écoutées sans les images qui vont avec sont celles d’Ennio Morricone. Du coup…
6) Caen ou Rouen ?
Raoul Tellier : Ahahaha ! Le Havre.
7) OK Computer ou The Bends ?
Raoul Tellier: Ah la vache. C’est dur, mais quand même, OK Computer.
8) Le meilleur endroit au monde pour faire un concert ?
Raoul Tellier : La grotte de Lascaux. Un des plus anciens sanctuaires de l’humanité, ça jetterait, non ?
9) Le meilleur endroit pour voir un concert ?
Raoul Tellier : Un endroit grand et beau… Je sais pas, l’Islande ? Quand il n’y fait pas trop froid. Une île, c’est certain. Avec la mer en fond de scène, et des montagnes de l’autre côté.
10) Tu peux créer un festival.. Quel nom ? Quelles têtes d’affiche ?
Raoul Tellier : Entre nous, il faut être un peu fou pour créer un festival aujourd’hui, il y a tellement de concurrence et de concepts forts… Pour le nom, je ne sais pas, mais un truc qui mêlerait de la bonne bouffe et de la bonne musique, ça m’irait bien. En têtes d’affiche… Punch Brothers, je ne les ai jamais vus et ils sont incroyables.
Et après, j’en sais rien… PJ Harvey, Queens of the Stone Age, Father John Misty, Arctic Monleys, et…Blur, tiens ! J’ai jamais vu Blur, ils ont l’air cool et ont écrit tellement de super chansons… Il faudrait aussi Ricky Gervais et Alexandre Astier, pour rire intelligemment.
Ça ressemblerait à rien, ce festival. Mais ça me plairait bien.
Avalanche de La Maison Tellier sera publié le 29 janvier 2016.
La Maison Tellier sera en tournée dans toute la France les mois prochains.
- Cinq est le numéro parfait
- Amazone
- J'ai rêvé d'avalanches
- Quelqu'un d'autre
- Haut;bas;fragile
- Beautiful again
- En toutes choses
- Où sont les hommes
- Garçon manqué
- 23h59
- Taros
La Maison Tellier - Avalanche
Merci messieurs d’accrocher vos riches couleurs à nos oreilles (coeurs ?).