[1987 – 2017] Biff Bang Pow(er to JC Brouchard) !

Dans une de ses nombreuses interviews, Alan McGee, alors patron de Creation Records, expliquait qu'il avait rapidement compris qu'il était plus doué pour repérer les bons groupes que pour jouer de la musique. Quand on regarde le catalogue de Creation Records, on se dit que l'animal n'a pas tort.


Et puis on écoute les disques de Biff Bang Pow ! et on se dit que McGee est injuste avec lui même. Certes les albums de son groupe n’ont pas la puissance tellurique des premiers Jesus & Mary Chain ou des premiers Oasis. Mais ils tiennent la corde de certains piliers de Creation ou de Rough Trade. Deuxième album du groupe, The Girl Who Runs The Beat Hotel entra dans le top 10 anglais (à la dixième place, faut pas pousser non plus). Produit par Joe Foster (membre fondateur des Television Personalities et patron de RevOla), ce disque est à recommander à tous les fans des Byrds et de Felt.

JC Brouchard

JC Brouchard est le spécialiste français du rock indé anglais des années 80. Il a notamment publié deux ouvrages : le premier sur Felt, le second sur les Television Personnalities. Ami d’Alan McGee, il a été membre des Biff Bang Pow !.

Quel âge avais-tu lors de l’enregistrement de The Girl Who Runs The Beat Hotel ?

JC Brouchard : Je suis né en mars 1963. J’avais presque 24 ans quand l’album est sorti. Pour mon âge à l’époque de l’enregistrement, c’est plus compliqué car, comme je l’explique dans ma chronique de l’album. The girl who runs the beat hotel est un album composite, avec une session principale en septembre 1986, une session en novembre 1985 pour un album annulé (qui devait s’appeler Submarines ou 16 velvet Fridays), et même un titre pioché dans les archives d’Andrew Innes (Formica Tops / Revolving Paint Dream).

Une question totalement idiote… Comment communiquez avec le groupe à cette époque ? Nous sommes en 1987 et les moyens de communication étaient beaucoup plus réduits qu’aujourd’hui…

Ce n’est pas du tout une question idiote. Régulièrement, je me demande comment j’ai pu organiser des concerts avec des anglais ou un américain sans avoir le téléphone chez moi, et encore moins accès à un fax ! Mais ça fonctionnait, avec le courrier, bien sûr. Et en 1986 j’avais le téléphone chez moi. Alan m’appelait de temps en temps, moi aussi, mais ça coûtait cher.

Comment t’es tu retrouvé en studio avec le groupe ? Quel est ton meilleur souvenir ? Comment organisais-tu tes déplacements ?

Je me suis retrouvé en studio avec le groupe car j’étais le conseiller spirituel d’Alan McGee et de Biff Bang Pow !. Je me suis retrouvé dans cette situation car j’ai sympathisé avec Alan et la bande de Creation lors d’une année universitaire passée à Londres en 1983-1984. J’ai voulu voir Television Personalities en concert et je me suis retrouvé à la Living Room. Cet épisode est conté dans mon livre à paraître au plus tard en mars. Il s’appellera Television Personalities : Journal d’un fan de chambre en français et Television Personalities : Diary of a youg fan en anglais. Il sera disponible en téléchargement gratuit à cette adresse.

Difficile de choisir un meilleur souvenir. Le moins bon, c’est que, quand on passe une journée entière en studio sans être musicien ni technicien, ça peut paraître long. Pour le meilleur, je vais quand même choisir ma modeste participation à l’enregistrement : quelques mots parlés sur If I die (en deux ou trois prises) et surtout le titre psychédélique Five minutes in the life of Greenwood Goulding : je devais parler pendant les quatre à cinq minutes que dure la chanson pour que ma voix passe ensuite à l’envers. Pas de paroles, juste quelques phrases clés et moi qui ne sait pas bien improviser. Il y a eu quelques fou rires et je crois qu’on a dû s’y reprendre en deux fois.

Biff Bang Pow! – If I die

Pour mes déplacements, c’était en train et/ou bus et ferry : bus ou train jusqu’à Paris ou, à certaines époques directement jusqu’à Calais, puis encore de Douvres à Londres. Traversée en ferry de Calais ou Dunkerque jusqu’à Douvres.
Je me souviens d’une fois où j’allais à Londres pour trois jours seulement, en hiver. La mer était mauvaise, quasiment tous les passagers vomissaient sur le pont, moi compris. Au petit matin, on nous a dit que le port de Douvres où on devait arriver n’était pas accessible, qu’ils allaient essayer l’autre partie du port, sinon il faudrait faire demi-tour. Heureusement, on a pu débarquer, sinon mon week-end était définitivement gâché !

Tu étais étudiant à cette époque ? De quoi vivais-tu ?

Oui j’étais étudiant, et comme j’avais repris en première année après mon séjour à Londres, je ne touchais plus de bourse. Je travaillais, donc, des contrats ponctuels, pendant les vacances mais aussi pendant l’année, en informatique et/ou archéologie.

Quelle était la place de ce groupe sur l’échiquier du rock « indé » anglais ? Quels étaient les enjeux de cet album ?

Clairement, dès que Creation a pris de l’ampleur, Biff Bang Pow ! n’est plus devenu que le groupe d’Alan McGee de Creation Records, indépendamment de ses propres qualités. Je ne sais pas quelles étaient les ambitions d’Alan pour son groupe à ce moment, mais il composait d’excellentes chansons, avait un bon collectif autour de lui, et ça lui tenait suffisamment à cœur pour enregistrer quatre albums entre 1985 et 1988. Il avait du talent, mais il en avait encore plus pour découvrir des groupes et leur faire rencontrer le public. Faire les deux ensemble n’était pas possible, et à un moment il a mis de côté sa propre création artistique pour se dédier à Creation (je sais, c’est facile…!). Être le groupe du patron du label a évidemment permis au groupe de sortir de nombreux disques, mais je pense qu’il aurait eu plus de succès sur le label s’il avait été un groupe « anonyme ».
Je pense qu’il n’y avait aucune attente particulière pour cet album, mais il aurait pu y en avoir pour un groupe indépendant de base puisque la précédente parution, l’excellent maxi Love’s going out of fashion, avait été bien reçu et était resté plus de deux mois dans les charts indépendants en montant à la sixième place.

Love’s Going out of Fashion – Biff Bang Pow!

Sur ton site, on peut lire que Creation, à cette époque, était un petit label. Le budget concernant cet album était réduit ?

Début 1987, avec plus de trois ans d’existence, Creation avait le vent en poupe, mais c’était encore un petit label indépendant, même s’il avait révélé The Jesus and Mary Chain, même si Primal Scream et The Weather Prophets avaient marqué l’année 1986 avec Crystal Crescent et Almost prayed et même si le label avait commencé à recruter à l’extérieur un groupe important comme Felt.
Alan allait lancer Elevation avec Warner, mais Creation fonctionnait encore de façon complètement artisanale. Certes, l’adresse officielle n’était plus son domicile, et il ne s’occupait sûrement plus de la compta en rentrant le soir, mais les premiers bureaux officiels sur Clerkenwell Rd c’étaient deux-trois pièces dans un immeuble, et les rares employés c’étaient des amis ou de la famille. Le budget de quasiment tous les disques Creation jusque-là était des plus réduits. Le studio Alaska avait l’avantage d’être l’un des moins chers de Londres. C’est plus difficile à dire pour The girl… parce qu’il y a plusieurs sessions, mais l’excellent album Oblivion enregistré plus tard en 1987, un excellent disque, très homogène pour le coup, a été enregistré intégralement en trois jours, mixage compris !

Biff Bang Pow ! - Someone stole my wheels

Biff Bang Pow! ‎– The Girl Who Runs The Beat Hotel

Quelle est ta chanson favorite sur ce disque ? Pourquoi ?

C’est bien sûr difficile à dire. Outre les contributions d’Andrew, il y a les chansons d’Alan, avec une excellente séquence de Love’s going out of fashion à The beat hotel. Je pense notamment que She never understood est une chanson qui aurait mérité un meilleur sort, qui aurait peut-être pu sortir en single. Mais je suis obligé de choisir la chanson, le seul instrumental, qui me fait directement référence, The whole world’s turning Brouchard !, sorti plus tard en 45 tours.J’en parle dans ma chronique.

Ils sont venus en France défendre ce disque ? Quel est ton meilleur souvenir de cette tournée ?

Il faut bien comprendre qu’entre les activités d’Alan et celles des différents membres du groupe, pas tous musiciens à temps complet, BBP! n’était pas non plus un groupe professionnel à 100%, avec un budget de promotion, un plan média et des tournées organisées pour accompagner la sortie d’un disque.
Pour fêter Someone stole my wheels à l’automne 1986, BBP§ a joué à Reims, mais c’était un concert isolé.

Pour The girl who runs the beat hotel, il y a eu des chroniques dans les trois hebdos rock (NME, Melody Maker, Sounds), mais ni article avec interview ni publicité presse, il me semble. Le groupe a joué au moins une fois en Angleterre, en première partie de Julian Cope, mais c’est tout je crois.

Un mois plus tard, le groupe est parti en tournée, en première partie de Felt à Bruxelles puis en Allemagne. On a fait le voyage à Bruxelles avec deux copains et, de façon impromptue, j’ai eu la possibilité de suivre une bonne partie de la tournée, en faisant une performance sur scène. C’est sûrement le concert dans l’atmosphère glaciale d’une Ancienne Belgique plutôt dégarnie qui reste mon meilleur souvenir.

Dave Evans

Dave Evans fut le bassiste des Biff Bang Pow ! après avoir joué avec les c 12 Cubic Feet. Il a aussi joué avec les Jesus and Mary Chain sur scène.

Pourquoi cet album s’appelle The Girl Who Runs The Beat Hotel ?

Dave Evans : Je ne sais pas. Il faudrait voir ça avec Alan. Il te donnerait la raison.

Combien de temps a duré l’enregistrement ?

On a toujours enregisté nos disques rapidement car nous n’avions pas beaucoup de budget et pas beaucoup de temps. On répétait quelques fois et on enregistrait les morceaux avec des prises live jusqu’à temps qu’on en soit satisfait. On rajoutait quelques overdubs et les voix. C’est tout.

Je me souviens plus de l’enregistrement d’Oblivion. Nous avons enregistré le disque en deux jours. Primal Scream est venu nous piquer le troisième jour de studio. On a mixé le disque en deux jours.

L’enregistrement a été facile ?

Oui ça été facile et surtout rapide. Tout se faisait en live. Il y avait un grand sentiment de camaraderie. On s’amusait beaucoup. Mes souvenirs préférés concernent plus le disque suivant, Oblivion. J’ai eu accès aux studios plus tôt que les autres pour mixer le disque, avec Noel Thomson, l’ingénieur du son.

Qui est Christine Wanless qui chante sur le disque ?

Christine était la petite amie d’Andrew Innes. Elle faisait partie des The Revolving Paint Dream avec Andrew et Luke Hayes. Tous vivaient dans quartier de L’île aux Chiens (Londres). Elle est créditée mais en réalité c’est Andrew qui a écrit les chansons. Je ne me souviens pas qu’elle chante. Je me souviens qu’Yvonne chante par contre. A cette époque j’étais en tournée avec les The Shop Assistants

Quelle est ta chanson préférée de ce disque ?

Someone Stole My Wheels même si je ne joue pas dessus. Et Love’s Going Out of Fashion. La ligne de basse est meilleure à la fin qu’au début. Je l’ai changée un tout petit peu et elle est devenue plus fluide ainsi. Je l’ai fait vivre.

Comment regardes-tu ce disque aujourd’hui ?

Je l’aime. J’aime tous les disques des Biff Bang Pow ! On a passé de bons moments à les faire.

Biff Bang Pow! ‎– The Girl Who Runs The Beat Hotel

The Girl Who Runs The Beat Hotel des Biff Bang Pow ! a été édité par Creation Records en 1987 et réédité en 2010 par le label allemand Vollwert-Records Berlin.

Biff Bang Pow! ‎– The Girl Who Runs The Beat Hotel

Tracklist : Biff Bang Pow ! - The Girl Who Runs The Beat Hotel
  1. Someone Stole My Wheels
  2. Love's Going Out Of Fashion
  3. She Never Understood
  4. He Don't Need That Girl
  5. She Shivers Inside
  6. The Beat Hotel
  7. The Happiest Girl In The World
  8. If I Die
  9. Five Minutes In The Life Of Greenwood Goulding
  10. The Whole World Is Turning Brouchard!

English text

Dave Evans

What’s the reason behinf the album title « The Girl Who Runs The Beat Hotel ?

I don’t know the reason for the name. I’m sure it was Alan that cam up with it.

How easy whas the recording process ? How long did it take you ?

BBP! Always recorded pretty quickly as we didn’t have much time or budget. We would practice a couple of times, record a few live tracks until we were happy with one then, add a few overdubs and then vocals and that was it.

The I remember most was Oblivion. We recorded for 2 days, then Primal Scream actually ‘borrowed’ our third day and then mixed for 2 days.

What’s your favorite memory about this recording process ?

The recording process was really quick for us and it had a live feel to it… as it was mostly live… just in a studio. There was a great feeling of camaraderie and fun when we were recording and some of it was just made up there and then.

My favourite time was recording Oblivion as I got to the studio early to mix it with Noel Thomson, the sound engineer, and we pretty much had it done before the others arrived.

How did you meet Christine Wanless ? Why did she sing on this album ?

Christine was Andrew Innes’s girlfriend. She was part of The Revolving Paint Dream with Andrew and Luke Hayes. They all lived in the Isle of Dogs. Although she is credited with some BBP! songwriting, it was actually Andrew. I don’t remember Christine singing but I do remember Yvonne singing. I was touring with the Shop Assistants about that time so I think some tracks I’m not on such as Someone Stole My Wheels.

What’s your favorite The Girl Who Runs The Beat Hotel’s song ?

Someone Stole My Wheels is my favourite I think even though I’m not on it. Then Love’s Going Out of Fashion. This was one case where we made some of it up at the time. The bass line towards the end of the song is better than at the beginning as I changed it slightly, making it more ‘fluid’ and I went on to play it that way live.

What are your feelings today about this record ?

Love it. Love all the BBP! records. We had a good time doing them.

Pouet? Tsoin. Évidemment.

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