RDV avec Mademoiselle K

Mademoiselle K (photo © Louis Teyssedou)
En 2015, Mademoiselle K avait fait très fort avec Hungry Dirty Baby (Kravache). Produite par Jolyon Vaughan Thomas (Dave Gahan) et Richard Woodcraft (Étienne Daho), la parisienne avait écrit des chansons parfaites (Someday, R U Swimming ?) qui sonnaient (et qui sonnent toujours) méchamment. Elle revient cette année avec Sous les Brûlures l'Incandescence Intacte, un disque né d'une rupture et qui la ramène vers un chant en français.


SK* n’a de cesse de croiser Mademoiselle K et ne s’en lasse pas. Entière et généreuse, K ne triche pas et écrit des chansons comme personne. Héritière de Strummer sur son dernier album, Mademoiselle K emprunte des chemins de traverse sur son nouvel album et cicatrise en chantant.

Mademoiselle K : On ne s’est jamais vu ?

Non mais tu as rencontré Alain qui t’avait filmé dans une baignoire translucide pour une session SK*… Te rappelles-tu de ce moment?

Discographie

Mademoiselle K : Oui, je m’en rappelle très bien !

Mademoiselle K – R U Swimming ? | SK Session

Je crois par contre que c’était dans une baignoire normale. C’est toujours cool de jouer dans des endroits différents.

Pourquoi es-tu passée par une campagne de financement participatif pour ce disque ?

Contrairement à l’album précédent, je n’avais plus d’argent de côté. Quand tu passes en ‘indé’, il faut du temps pour te constituer une trésorerie. C’est assez simple. Et on est passé à côté d’une subvention. On s’est donc dit qu’une campagne de crowdfunding était nécessaire.

Tu as été surprise de l’accueil et de sa réussite ? Tu as obtenu 100 % très rapidement.

Oui et non. Je connais ma fan base et je sais qu’elle est solide. Elle est super. Mais à partir du moment où tu demandes de l’argent… Les temps sont durs pour tout le monde. Ce n’était donc pas gagné d’avance. On ne savait pas. On savait qu’on aurait un minimum. Mais atteindre 20 000 euros en 24 heures était inespéré. Et 67 000 euros en tout ! Mais je précise que je ne touche pas 67 000 euros.

Oui, j’ai vu que tu avais fourni le détail de la répartition…

Je touche à peu près la moitié. Un peu plus. C’est plus honnête de dire que nous avons eu 35 000 euros.

Mademoiselle K (photo © Louis Teyssedou)
Mademoiselle K (photo © Louis Teyssedou)

Et où as tu enregistré ce disque ?

Dans plein d’endroits différents. Aujourd’hui, je ne sais pas si tu peux arriver à enregistrer ton disque dans un seul et même studio. Les groupes n’ont plus le budget pour investir un grand studio. J’avais enregistré mon premier album aux studios Ferber sur une durée de 10 jours. Aujourd’hui, ce ne serait plus possible. Et encore 10 jours… Les groupes dans les années 70 pouvaient rester dans les studios bien plus longtemps.

Je l’ai donc enregistré dans différents endroits. J’ai travaillé avec un nouveau musicien : Jérémie Poirier-Quinot (SatinCoco). Il a fait les morceaux plus électro comme Suckin’ My Brain ou Bonjour Bonjour. On a vraiment bâti les morceaux à deux.

Une autre partie de l’album a été enregistrée à la campagne chez des amis. Ils m’ont prêté gracieusement leur studio qui est un endroit magnifique. On y a fait toutes les prises live avec le groupe (Sous les brûlures, J’ai pleuré). On a fait les batteries de S I C K aussi. Les morceaux ont été fait en plusieurs étapes. C’est la première fois que cela m’arrive, de trimballer des morceaux.

S I C K… On l’a maquetté avec Peter. Et puis je voulais une couleur particulière. On a maquetté toute l’année. La première prise voix a été la bonne. Je n’avais jamais fait ça : en gros la maquette, c’est l’album. On a amélioré certaines choses mais on a gardé l’essentiel. L’interprétation était la plus juste au départ au niveau de l’émotion. Au niveau technique, il y aurait peut-être des choses à redire mais au niveau de l’émotion c’est parfait.

Tu reviens au français : 7 chansons sur les 10 que contient l’album sont en français. Il s’est imposé de lui même ce retour en français?

Oui, de la même manière que les chansons en anglais sont venues d’elle même. J’avais l’idée de faire tout l’album en français. Mais les chansons en anglais se sont imposées. Pourquoi les refuser ? Elles se sont présentées à moi et font partie de l’histoire. La spécificité de cet album est qu’il s’agit d’un album qui évoque une rupture, du début à la fin. L’album se finit par la première chanson que j’ai composée au début de cette relation (à savoir We’re Kissing Baïe baïe). Je boucle la boucle. Ce n’est pas un concept album mais tu suis une histoire. J’ai embrassé ce qui s’est présenté à moi. La règle que je me dois de garder est de conserver les meilleures chansons.

Il y en a 10. Cela veut dire qu’il y avait d’autres chansons ?

Oui. Il y a d’autres que j’aime beaucoup.Je mes les trimballe depuis quelques temps. L’une d’entre elle s’appelle No Sex Tonight. Je l’ai écrite pour Hungry Dirty Baby. Elle n’a pas sa place sur l’album. Mais je l’aime beaucoup. Son temps viendra mais elle n’a rien à voir avec le reste des chansons. Après, il y en a… pas. Je n’ai pas une vitesse d’écriture du Concorde, enfin de feu le Concorde.

Et cette pochette ?

Je savais que je voulais faire une photo nue avec un groupe d’amis et des gens importants pour moi. Une rupture au final amène de beaux moments. C’est tout le paradoxe de la rupture : tu fais de belles rencontres. Des moments super durs côtoient des des moments merveilleux. Cela nous bascule dans une humanité plus forte. C’est comme pour les attentats de Paris. La chanson J’ai pleuré les évoque. Nous avons eu besoin de nous retrouver. C’est une réflexion générale sur l’humanité, la mort.

Tu vas jouer ces nouvelles chansons sur scène. Elles sont très intimes. Cela ne te dérange pas ?

Le côté intimiste a toujours fait partie de mon champ sémantique. C’est ma manière de m’exprimer. J’estime que si tu n’es pas impliqué dedans, ne fais pas de chanson. Tout le monde se rejoint via les chansons.

Cet album m’a fait un bien fou. Il s’agit d’une rupture. Tu passes par des moments très difficiles et des chansons sont venues d’elles-mêmes. J’ai foncé. Sur scène, est-ce que j’ai envie de revenir dans cette histoire ? SICK, On s’est laissé et Ca ne sera pas moi ont déjà été testées en concert. C’était encore plus frais par rapport à ma rupture et cela m’avait fait du bien de les chanter. Après, les chanter pour moi sera un peu une catharsis. Cela va bien se passer. Cette rupture s’est transformée en chansons. C’est la magie de la musique.

Tes chansons ont leur existence propre.

Exactement. Elles sont là pour faire rêver et t’emmener ailleurs.

Qui est Marine Guizy, la réalisatrice de ton nouveau clip ?

C’est quelqu’un qui vient du documentaire. Je l’ai rencontrée sur un festival. Il se trouve qu’elle travaillait avec quelqu’un que je connaissais. Nous nous sommes croisées par hasard. Elle faisait un documentaire sur le consentement.

Mademoiselle K – On s’est laissé

Sur le consentement ?

Sur le consentement sexuel. Où en sommes-nous ? Elle a étudié cela dans tous les couples. J’aimais bien cette approche différente à l’image. On a beaucoup mûri ce clip ensemble. C’est parti d’une idée très simple ce clip avec ce vélo. Un jour elle est venue me voir avec ce film de La Nouvelle Vague qui s’appelle C’était un Rendez-Vous réalisé par Claude Lelouch. Un mec roule en voiture dans Paris pendant 8 minutes, enfin 7 minutes 50, sort de sa voiture et rejoint sa fiancée. J’ai adoré ! On a reprit les mêmes codes sauf que moi c’est une rupture. On voulait une chute à la fin. On a mis du temps à trouver. Dans cette chanson, il y a cette volonté de ne pas détester la personne. En fait, je voulais tabasser quelqu’un à la fin du clip. Et on s’est dit que ce serait un mannequin. Et puis il y a les bonbons fraises en forme de cœur. J’aime les choses absurdes. Tout ça pour récupérer un cœur…

Quelle est ta chanson préférée sur cet album ?

C’est dur, très dur. Je te donne deux réponses. La chanson que j’ai le plus écoutée est S I C K. Elle a un truc planant. Elle fait rêver. Je rêve beaucoup sur cette chanson. Et je rêve de beaucoup de choses. J’aime aussi Suckin’ My Brain.

Deux chansons en anglais..

.
Oui c’est drôle. J’ai beaucoup écouté On s’est laissé. Et Suckin’ My Brain. J’adore ce morceau. Je l’ai testé en concert et j’ai senti que les gens n’accrochaient pas trop dessus. Pareil dans mon entourage où des gens l’aimaient et d’autres non. Et j’adore ce morceau et son arrangement. Jérémy y est pour beaucoup. Et Antoine qui a masterisé cet album a lui aussi adoré ce morceau. J’ai failli ne pas l’intégrer car j’avais ce doute. J’adore le parcours de morceau. Il possède un univers riche et dit plein de choses.

Sous les Brûlures l’Incandescence Intacte de Mademoiselle K sera disponible le 1er septembre 2017 via le label Kravache.
Mademoiselle K sera en tournée dans toute la France et passera au Bataclan le 22 novembre 2017.

Mademoiselle K - Sous les Brûlures l'Incandescence Intacte

Tracklist : Mademoiselle K - Sous les Brûlures l'Incandescence Intacte
  1. Bonjour bonjour
  2. S I C K
  3. On s'est laissé
  4. J'ai pleuré
  5. Sous les brûlures
  6. Pour aller mieux
  7. Ça ne sera pas moi
  8. Hypnotisés vers la lumière
  9. Suckin' My Brain
  10. We're Kissing Baïe Baïe

Pouet? Tsoin. Évidemment.

Cela pourrait vous intéresser

Plus dans Interviews

Louisecombierportrait04b

5 questions à Louise Combier

Avant son passage très attendu à la salle des Rancy à Lyon le jeudi 28 novembre, Louise Combier nous parle de ses morceaux du moment.
Massilia

Massilia à Massilia !

Massilia Sound System fête ses 40 ans d’existence en tournée et par un concert gratuit sur le Vieux Port de Marseille le 19 juillet. SK* les a rencontrés au Vercors music festival avant un concert qui s’annonçait dantesque stoppé net par l’orage.
Cmathieuteissier1

Rêve éveillé avec Lescop

Lescop sort du bois avec un nouvel album, Rêve parti qui fera danser Les garçons et vous retirera la raison avec la femme papillon. Entretien avant son concert à La Rayonne à Villeurbanne le samedi 9 mars.
Julienshelter-matthieudortomb4

5 questions à Julien Shelter

Avec Island, Julien Shelter nous propose un album cocon, un disque refuge pour se ressourcer avec des titres délicats évoquant l’amour, la nature ou l’enfance.