Depuis 2002, la jeune liverpuldienne voit défiler des groupes qui envoient les enceintes voler au Zanzibar, un club à deux pas de Parr Street. Les Zutons, les Stands et les Coral ont réussi à attirer tous les pigistes du N.M.E. lors de leurs soirées et Noel Gallagher. Tous les fans d’Oasis se rappellent du concert du patron au Zanzibar. Ce dernier y avait joué sa « meilleure chanson » selon lui, Stop The Clocks. Évidemment, ce fut un feu de paille quand on découvrit la chanson sur le premier album de Noel Gallagher. L’arrivée du taulier d’Oasis en ville déclenchera différentes réactions. Avant qu’il ne les sauve économiquement, les Coral se fichent ouvertement de l’intérêt qu’ils suscitent auprès de celui qui a écrit Supersonic.
Quant aux Stands,ils hébergent Noel et le laisseront jouer de la guitare All Years Leaving, leur premier album.
Et par on ne sait quel miracle, Noel Gallagher se retrouva à publier l’ultime de Shack, le groupe des frères Head.
Après avoir publié … Here’s Tom With the Weather via le label North Country, les frères Head se sont évidemment retrouvés sans label. … Here’s Tom With the Weather avait atteint péniblement la cinquante-cinquième place des charts anglais. Noel Gallagher va se retrouver à publier The Corner of Miles and Gil par le plus grand des hasards sur son label qui ne compte que les tâcherons de Proud Mary. L’album comme son prédécesseur finira aussi à la cinquante-cinquième des classements. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas…
Pourtant The Corner of Miles and Gil aurait pu avoir un autre destin. Il a bénéficié d’une promotion de bonne facture (Shack ouvra pour Oasis lors de sa tournée des stades anglais de 2006 et le photographe Lawrence Watson fut recruté pour les photos de presse) et reçu un accueil dithyrambique par la presse française et anglaise. Le zigoto de Mick Head avait plié toute la concurrence et tous les pigistes de première bourre en sortant de son chapeau une de ses lubies : le jazz. On connaissait la dévotion de Mick Head pour Arthur Lee, on ne savait pas son adoration pour Miles Davis. Sur l’ultime disque de Shack, il prend tout le monde de court et envoie les bas-fonds de Liverpool valser dans les clubs de la Nouvelle-Orléans. Et comme d’habitude, c’est un sans-faute.
SK* a discuté avec Yorkie, le producteur de ce disque et Howie Payne, le chanteur des Stands.
Yorkie
Comment as-tu rencontré Mick Head ?
Discographie
ShackYorkie : J’ai connu Mick grâce à Paul Simpson des The Teardrop Explodes. Ces derniers faisaient des répétitions dans ma cave et Paul m’a dit qu’il avait rencontré un type qui voulait monter un groupe. Comme il savait que je voulais en fonder un, il s’est chargé de faire les présentations. Le premier groupe que nous avons monté ensemble s’appelait The Dance Party. Le second Egypt For Now.
Comment t’es tu retrouvé à produire The Corner of Miles and Gil ?
Yorkie : Je n’avais pas vu Mick depuis des années quand je suis tombé dessus par hasard sur lui, sa femme et ses enfants un jour à Liverpool. Je lui ai demandé ce qu’il devenait et quels étaient ses projets. Depuis la dissolution de Space, j’avais produit pas mal de groupes. Il m’a demandé si je serais intéressé par faire « quelque chose de beau ». J’ai répondu par l’affirmative. Il m’a rappelé le lendemain (il se rappelait de mon numéro de téléphone alors qu’on ne s’était pas appelé depuis vingt ans). John m’a confié qu’il avait voulu que je les produise après H.M.S. Fable. Mais rien ne c’était fait à cette époque.
Après les avoir rencontré, nous avons commencé à enregistrer des démos dans mon studio. Nous avons enregistré cinq ou six démos, que nous avons transmises à Liam et Noel Gallagher. Surtout Shelley Brown.
Shack – Shelley Brown
Ce fut un enregistrement difficile ? Combien de temps a-t-il duré ?
Yorkie : L’enregistrement des démos a pris six mois. On travaillait avec des boucles et des parties de batterie programmés. J’assurais la basse. Puis, quand Noel a fait partie de l’aventure, nous sommes partis aux studios de Highfield Street avec Pete Wilkinson et Iain Templeton. Le tout a pris quatre mois. Nous n’avions aucune pression et nous avons pris le temps nécessaire pour faire quelque chose de bien. Tout cela a été rendu possible grâce à Noel Gallagher. Il était fan de notre travail et a publié le disque sur son label. Il nous a laissés totalement libres et il n’est jamais intervenu.
C’était facile de travailler avec eux ?
Yorkie : Ils sont fantastiques en studio. Comme en tournée. Je les avais managés une fois.
Les gens disent que c’était un cauchemar de travailler avec eux. Je n’ai jamais eu ce sentiment. Peut-être parce que je les connais depuis longtemps.
Quel est ton meilleur souvenir lié à cet enregistrement ? Le pire ?
Yorkie : Mes meilleurs souvenirs sont ceux d’avoir travaillé avec le groupe et d’avoir pu modeler le son. Je joue du clavier sur quasiment tous les morceaux et j’ai fait les arrangements des cuivres et des cordes. Pour les cordes, nous avons eu recours au Colliery Brass Band. Pour les cordes, nous avons recruté des membres de l’orchestre philharmonique de Liverpool.
Un de mes pires souvenirs est les doutes de John concernant Find A Place. Il trouvait qu’elle sonnait différemment des autres et qu’elle était expérimentale. Je lui ai donné raison mais nous l’avons conservée. Ce fut une des premières chansons que nous avons envoyée à Sour Mash. Ce fut la première chanson a récolter des compliments.
The Corner of Miles and Gil a été publié via Sour Mash, le label de Noel Gallagher. Il est venu vous voir lors de l’enregistrement ?
Yorkie : Oui, mais pas seulement. Shack a fait une série de 12 dates en première partie d’Oasis pour promouvoir ce disque.
Comment as-tu trouvé le son de ce disque ? The Corner of Miles and Gil se singularise dans la discographie du groupe par son son ?
Yorkie : J’en avait discuté avec Mick : cet album est plus léger et plus jazzy que les autres albums de Shack. John était d’accord. Iain et Pete aussi. Le reste est dû à mes techniques de production. Je ne veux jamais bloquer le groupe avec lequel je travaille. Il s’agit de leur album, pas du mien.
Cependant, je tiens à souligner mon rôle en tant que producteur. Je suis comme un illustrateur, je reste tapi dans l’ombre mais je colorie les morceaux et j’ajoute un peu de profondeur à l’histoire racontée. Je fais de la musique comme on tourne un film. C’était amusant de voir leur réticence à utiliser les nouvelles technologies. Ils étaient très suspicieux à l’idée de se passer des bandes et d’utiliser un ordinateur. Mais on a réussi à les convaincre, notamment grâce à l’ingénieur (le merveilleux Pat O’Shughnessey) et en leur montrer les bénéfices.
Quelle est ta chanson préférée sur ce disque ? Pourquoi ?
Yorkie : Closer.
Mick a toujours été très méticuleux dans les finitions de ses chansons. Closer en est un bon exemple.
Je venais de passer pas mal de temps avec Mick. Je lui avais expliqué comment je voyais le chanter à la fin de cette chanson. Je voulais quelque chose qui sonne comme le troisième album du Velvet Underground : quelque chose d’intime et de chaleureux mais qui te prenne à la gorge. Je lui ai envoyé mes instructions un après-midi en lui disant de ne pas revenir tant que ça ne serait pas fait. Il est revenu le lendemain. Lors de la première prise de cette chanson, il s’est soudainement arrêté avant la fin. Je suis allé le voir. Il était en larmes et il m’a demandé d’où venaient les cordes. Je lui ai répondu qu’on les avait enregistrées quand ils finissaient d’écrire les paroles au pub.
Shack – Closer
Howie Payne
Comment as-tu découvert la musique de Mick Head ? Avec les Pale Fountains ?
Howie Payne : Je ne connaissais pas les Pale Fountains. Mais la chanson I Know You Well passait souvent au MacMillans, un club où je passais pas mal de temps. Il passait de la musique. Désormais je crois que c’est une librairie.
Mick Head est un héros, un modèle pour vous ? Je me rappelle avoir vu une photographie montrant Mick Head jouait et avoir comme public les Stands et les Coral. Ils vous a inspiré ?
Howie Payne : J’analyse sa musique. Something Like You est une belle et grande chanson.
La photographie dont tu parles a été prise au V Festival en 2005. Beaucoup de groupes de Liverpool jouaient ce jour là. Oasis jouait aussi. Mais je ne me rappelle pas de leur show. Mais je les ai aperçus.
C’est moi qui ai pris cette photo. J’étais au milieu et il y avait plus de monde. On regardait Shack jouer avec un beau coucher de soleil.
Quelle est ta chanson préférée de The Corner of Miles and Gil ?
Howie Payne : Miles Apart.
Tu acheté cet album ?
Howie Payne : Non, on me l’a offert.
Tu as ouvert, avec les Stands, pour Shack, lors d’une tournée. Quel est ton meilleur souvenir ?
Howie Payne : L’édition du V Festival fut sensationnelle. Nous aurions bien voulu rester pour faire la fête mais le lendemain nous avions un concert… Nous avons dû prendre la route.
Quand nous nous apprêtions à partir, je me trouvais dehors avec Liam Gallagher. Mick Head était pas très loin, assis tout seul sur l’herbe.
« Putain de merde, c’est Mick Head ? »
Je pense qu’il ne l’avait jamais rencontré. On s’est promené tous les trois et ils ont discuté de musique comme s’ils se connaissaient depuis toujours. J’ai posé un pack de bière entre les deux. Je le portais depuis le vestiaire…
Comme je te disais, nous avons dû repartir tôt… En roulant, je me suis retourné et je les ai vus, tous les deux, assis dans l’herbe avec en fond un magnifique coucher de soleil et le public du V Festival.
Howie Payne est en tournée dans toute l’Angleterre à la rentrée.
The Corner of Miles and Gil de Shack est disponible via le label Sour Mash.
- Tie Me Down
- Butterfly
- Cup Of Tea
- Shelley Brown
- Black And White
- New Day
- Miles Away
- Finn
- Sophie
- Bobby And Lance
- Moonshine
- Funny Things
- Find A Place
- Closer